By Yannick Dyant on vendredi 14 décembre 2012
Category: Actualités publiques

La ministre de la Santé évoque pour la 1ère fois le transfert d'actes à des « optométristes »

Pour la toute première fois, le gouvernement a annoncé envisager de confier certaines missions à des « optométristes ».

Invitée ce 14 décembre dans l'émission Bourdin & Co sur RMC, Marisol Touraine a explicitement évoqué le transfert d'actes vers ces professionnels qui, rappelons-le, ne sont pas reconnus en France.

« L'accélération des transferts de compétences est importante. Tout le monde dit qu'il y a plusieurs mois d'attente pour un rendez-vous chez l'ophtalmologiste. Si on définit clairement quelles sont les tâches que seul le médecin ophtalmologiste peut faire, et qu'on transfère par exemple, à des optométristes d'autres actes, eh bien on soulage d'autant les carnets de rendez-vous des médecins » a déclaré la ministre de la Santé.

Une prise de position sans précédent


La déclaration de Marisol Touraine marque une rupture avec la politique du précédent gouvernement, qui soulignait régulièrement sa franche opposition à la reconnaissance de l'optométrie en France, en insistant sur le fait que « le diplôme d'opticien-lunetier et le diplôme d'orthoptiste sont les seuls diplômes professionnalisant de la filière visuelle ». Rappelons également qu'avant son élection, le candidat François Hollande annonçait clairement ne pas vouloir revenir sur le décret de 2007 vous autorisant à renouveler les lunettes sur la base d'une ordonnance de moins de 3 ans, et ne voyait « pas de justification pour confier aux opticiens la capacité de prescrire des lunettes ou des lentilles sans recours à un ophtalmologiste ou un orthoptiste ».

Vos syndicats divisés sur l'éventuel élargissement de vos missions


L'AOF (Association des optométristes de France) se réjouit de la toute nouvelle prise de position de Marisol Touraine et remercie la ministre « de sa confiance envers les optométristes », en incitant tous les optométristes français à faire de même pour prouver leur mobilisation. Reste à savoir comment pourraient se concrétiser les transferts de tâches évoqués. Impliqueront-ils une reconnaissance de l'optométrie ? Quels pourraient être les actes transférés ? Car si l'AOF milite pour une optométrie à l'anglosaxonne, incluant la réfraction, les adaptations de lentilles, mais aussi le dépistage des maladies oculaires, l'UDO (Union des opticiens) et le SNOO (Syndicat national des opticiens-optométristes) plaident pour une optométrie « à la française », limitée à la prescription de lunettes et de lentilles. Les autres organisations professionnelles n'utilisent pas ce terme, mais souhaitent élargir vos prérogatives. Pour la Fnof (Fédération nationale des opticiens de France), « les professionnels et les pouvoirs publics doivent discuter pour voir comment nous pouvons améliorer les décrets de 2007 ». Le SynOpe (Syndicat des opticiens sous enseigne) estime qu'il « faut augmenter le délai de validité de l'ordonnance pendant lequel les opticiens peuvent renouveler les équipements, et se pencher sérieusement sur la question de l'adaptation de lentilles ». Le Synom (Syndicat national de l'optique mutualiste) prône quant à lui des coopérations au sein de la filière de santé visuelle, en partenariat avec les ophtalmologistes et sous certaines conditions, notamment de formation : « s'il s'agit de la réfraction, il sera alors important de former à cet examen, de façon équivalente, les opticiens et les orthoptistes. Complétons la formation des opticiens, étendons leur champ de compétences pour des missions futures », a-t-il récemment proposé.

L'optométrie, une monnaie d'échange ?


Une autre question se pose : l'amélioration de l'accès aux soins ophtalmologiques est-elle la seule motivation du ministère de la Santé ? En parallèle, sa proposition pourrait bien poursuivre un autre but, comme celui de mieux faire « passer la pilule » des réseaux de soins en optique. Affaire à suivre...